• La Cithare du Bonheur

    C'était un homme droit et sincère qui cherchait le chemin du bonheur, qui cherchait le chemin de la vérité. Il alla un jour trouver un vénérable maître soufi dont on lui avait asuré qu'il pourrait les lui indiquer. Celui-ci l'accueillit aimablement devant sa tente et, après lui avoir servi le thé à la menthe, lui révéla l'itinéraire tant attendu : « C'est loin d'ici, certes, mais tu ne peux te tromper : au coeur du village que je t'ai décrit, tu trouveras trois échoppes. Là te sera révélé le secret du bonheur et de la vérité. »

    La route fut longue. Le chercheur d'absolu passa maints cols et rivières. Jusqu'à ce qu'il arrive en vue du village dont son coeur lui dit très fort : « C'est là le lieu ! Oui, c'est là ! » Hélas ! Dans chacune des trois boutiques il ne trouva comme marchandises que rouleaux de fils de fer dans l'une, morceaux de bois dans l'autre et pièces éparses de métal dans le troisième. Las et découragé, il sortit du village pour trouver quelque repos dans une clairière voisine.

    La nuit venait de tomber. La lune remplissait la clairière d'une douce lumière. Lorsque tout à coup se fit entendre une mélodie sublime. De quel instrument provenait-elle donc ? Il se dressa tout net et avança en direction du musicien. Lorsque, stupéfaction, il découvrit que l'instrument céleste était une cithare faite de morceaux de bois, des pièces de métal et des fils d'acier qu'il venait de voir en vente dans les trois échoppes du village.

    A cet instant, il connut l'éveil. Et il comprit que le bonheur est fait de la synthèse de tout ce qui nous est déjà donné, mais que notre tâche d'hommes intérieurs est d'assembler tous ces éléments dans l'harmonie.

    Conte soufi

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  •  La plus délicate des roses
    Est, à coup sûr, la rose-thé.
    Son bouton aux feuilles mi-closes
    De carmin à peine est teinté.

    On dirait une rose blanche
    Qu'aurait fait rougir de pudeur,
    En la lutinant sur la branche,
    Un papillon trop plein d'ardeur.

    Son tissu rose et diaphane
    De la chair a le velouté ;
    Auprès, tout incarnat se fane
    Ou prend de la vulgarité.

    Comme un teint aristocratique
    Noircit les fronts bruns de soleil,
    De ses soeurs elle rend rustique
    Le coloris chaud et vermeil.

    Mais, si votre main qui s'en joue,
    A quelque bal, pour son parfum,
    La rapproche de votre joue,
    Son frais éclat devient commun.

    Il n'est pas de rose assez tendre
    Sur la palette du printemps,
    Madame, pour oser prétendre
    Lutter contre vos dix-sept ans.

    La peau vaut mieux que le pétale,
    Et le sang pur d'un noble coeur
    Qui sur la jeunesse s'étale,
    De tous les roses est vainqueur !


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  • « Je me sens triste ! » dit une vague de l'océan en constatant que les autres vagues étaient plus grandes qu'elle. « Les vagues sont si grandes, si vigoureuses, et moi je suis si petite, si chétive. »
    Une autre vague lui répondit : « Ne sois pas triste. Ton chagrin n'existe que parce que tu t'attaches à l'apparent, tu ne conçois pas ta véritable nature. »
    « Ne suis-je donc pas une vague ? »
    « La vague n'est qu'une manifestation transitoire de ta nature. En vérité tu es l'eau. »
    « L'eau ? »
    « Oui. Si tu comprends clairement que ta nature est l'eau, tu n'accorderas plus d'importance à ta forme de vague et ton chagrin disparaîtra. »
    Avoir à l'esprit que l'humanité fait partie d'un ensemble est important. Car l'être humain se considère souvent comme le centre des choses en s'arrogeant des droits particuliers qui n'ont pas de raison d'être. Ainsi il ne voit que chez son prochain ce qu'il n'a pas, sans voir ce qu'il a déjà, et se cause les plus inutiles soucis.
    Zen


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  • Écoutez la chanson bien douce
    Qui ne pleure que pour vous plaire.
    Elle est discrète, elle est légère :
    Un frisson d'eau sur de la mousse !

    La voix vous fut connue (et chère?),
    Mais à présent elle est voilée
    Comme une veuve désolée,
    Pourtant comme elle encore fière,

    Et dans les longs plis de son voile
    Qui palpite aux brises d'automne,
    Cache et montre au coeur qui s'étonne
    La vérité comme une étoile.

    Elle dit, la voix reconnue,
    Que la bonté c'est notre vie,
    Que de la haine et de l'envie
    Rien ne reste, la mort venue.

    Elle parle aussi de la gloire
    D'être simple sans plus attendre,
    Et de noces d'or et du tendre
    Bonheur d'une paix sans victoire.

    Accueillez la voix qui persiste
    Dans son naïf épithalame.
    Allez, rien n'est meilleur à l'âme
    Que de faire une âme moins triste !

    Elle est en peine et de passage,
    L'âme qui souffre sans colère,
    Et comme sa morale est claire !...
    Écoutez la chanson bien sage.

    Paul Verlaine, Sagesse


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  • Combien pèse un flocon de neige ?


    "Dis-moi, combien pèse un flocon de neige ?", demanda la mésange à la colombe.
    "Rien d'autre que rien", fut la réponse.

    Et la mésange raconta alors à la colombe :
    "J'étais sur une branche d'un sapin quand il se mit à neiger. Pas une tempête, non, juste comme un rêve, doucement, sans violence. Comme je n'avais rien de mieux à faire, je commençai à compter les flocons qui tombaient sur la branche où je me tenais. Il en tomba 3.751.952. Lorsque le 3.751.953ème tomba sur la branche - rien d'autre que rien comme tu l'as dit - celle-ci cassa."

    Sur ce, la mésange s'envola.

    La colombe, une autorité en matière de paix depuis l'époque d'un certain Noé, réfléchit un moment et se dit finalement :
    "Peut-être ne manque-t-il qu'une personne pour que tout bascule et que le monde vive en paix !"


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